Les élections européennes du 9 juin 2024 au soir ont déclenché une situation politique inédite à tous égards. En votant majoritairement pour les partis d’extrême droite, les électrices et électeurs ont concrétisé dans les urnes le sentiment tenace que ces idées nauséabondes infusent désormais dans tout l’espace politique et public après des années de légitimation et de diffusion rampante. A ce premier coup de tonnerre en a rapidement succédé un second : le président de la république, dans un pari insensé, annonçait la dissolution de l’Assemblée Nationale et la convocation d’élections législatives sous trois semaines avec le risque fort d’une extrême droite majoritaire à l’Assemblée Nationale.
L’horizon, dimanche 9 juin 2024, était bien sombre pour les électeurs et électrices de gauche. Quel espoir avec une gauche en miettes ?
Mais la dissolution a fait l’effet d’un électrochoc. En quelques jours, les forces de gauche sont parvenues à un accord de partis, à la publication d’un programme, à s’accorder sur la répartition des candidat es, malgré quelques remous. La dynamique du Nouveau Front Populaire, attendue depuis des années, a suscité une espérance forte et une mobilisation qui traverse avec effervescence une grande partie de la société.
Le monde syndical et associatif n’a pas attendu pour prendre ses responsabilités et organiser la lutte contre le RN et plus largement l’extrême droite, notamment par des rassemblements et des manifestations. Dans notre académie, 7 mobilisations, dans lesquelles le SNES-FSU et la FSU ont pris toute leur place, ont eu lieu le samedi 15 juin, réunissant plusieurs milliers de personnes.
Le danger de voir l’extrême droite arriver au pouvoir est réel et exige du SNES-FSU un engagement plus fort que jamais. Un sursaut démocratique et social est urgent pour empêcher l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir, la banalisation d’un racisme quotidien, les attaques contre les droits des femmes et des personnes LGBTQIA+, les conséquences désastreuses des politiques économiques et sociales menées.
Le message est clair : aucune voix des adhérent es du SNES-FSU ne doit aller à l’extrême droite. Le SNES-FSU est un syndicat de l’éducation. Or le RN, par son racisme, sa xénophobie, son exaltation d’une école du passé mythifiée, est un danger majeur pour l’école. Nos élèves et leurs parents, nos collègues, issu es de l’immigration, LGBTQIA+, seraient particulièrement menacé es. L’école du RN, c’est l’école de l’exclusion, la volonté d’évincer de l’école les élèves en situation de handicap, la promotion du privé confessionnel et l’accentuation du séparatisme scolaire et social amorcé par l’actuel gouvernement ; c’est la mise sous surveillance des personnels – qu’on pense aux pratiques des « parents vigilants » ou autres « mamans louves » ; c’est la mise en question de la légitimité des organisations syndicales.
Par ailleurs, après 7 ans de présidence Macron et sous des gouvernements issus de sa majorité, le SNES-FSU ne peut pas se contenter d’appeler à faire barrage à l’extrême droite. Ces gouvernements ont montré, les uns après les autres, à quel point ils étaient éloignés des valeurs démocratiques et des revendications portées par le SNES-FSU et la FSU : réforme des retraites, loi asile-immigration, réforme de l’assurance chômage, loi de transformation de la fonction publique, loi ORE et parcoursup, réformes Blanquer du lycée et du baccalauréat, protocole d’accord avec l’enseignement privé, réforme du lycée professionnel, réforme du collège instituant le tri social par les groupes de niveau et le DNB examen d’entrée au lycée, nomination scandaleuse au Ministère d’Amélie Oudéa Castéra, réforme de la formation initiale, volonté de faire du mérite l’alpha et l’oméga de la carrière des fonctionnaires, mise au pas de la jeunesse. Les conditions de travail sont fortement dégradées, la liberté pédagogique est attaquée, la revalorisation promise s’est transformée en travail supplémentaire par le biais du Pacte. Les organisations syndicales sont profondément méprisées et leurs militant
Le "choc des savoirs" préfigure l’exécution du programme du RN : une école du tri et de la discrimination sociale. La baisse drastique des moyens annoncée pour la rentrée 2024 annonce une situation intenable dans les collèges mais aussi dans les lycées. Les luttes déjà menées depuis des mois ne peuvent pas s’éteindre du fait du calendrier politique. Nous devons poursuivre la construction de la résistance sur le terrain en continuant à porter la mobilisation avec les collègues par le combat en CA, le refus de la mission de professeur e principal e.
Mais aujourd’hui, la lutte contre le choc des savoirs se joue d’abord dans les urnes.
Le SNES-FSU se reconnaît pleinement dans le programme du Nouveau Front Populaire, la seule force de gauche à même d’obtenir une victoire électorale.
Outre des mesures attendues par des pans entiers de la société (abrogation de la réforme des retraites, des réformes de l’assurance-chômage, hausse de 10% du point d’indice, indexation des salaires et des pensions sur l’inflation, planification écologique, rétablissement de l’ISF) ce programme propose de nombreuses mesures conformes aux mandats du SNES-FSU et de la FSU dans le domaine de l’éducation : abrogation du « choc des savoirs », préservation de la liberté pédagogique, réduction des effectifs par classe, prise à bras le corps du problème de la mixité sociale, abolition de Parcoursup, renforcement des équipes pluriprofessionnelles dans les établissements, revalorisation salariale, formation et titularisation des AESH, revenu étudiant….
Considérant la gravité de la situation politique et le point de bascule démocratique, se rendre aux urnes les 30 juin et 7 juillet prochains est plus essentiel que jamais pour éviter l’arrivée au pouvoir du Rassemblement National. La section académique du SNES-FSU appelle donc à voter dès le premier tour des élections législatives pour une véritable alternative de progrès et de justice sociale que l’on retrouve dans le programme du Nouveau Front Populaire. Elle le fait en toute indépendance vis-à-vis des partis politiques et avec la gravité liée à un contexte inédit de danger imminent pour les droits et les libertés, mais aussi avec exigence et sans concession pour un futur gouvernement.
En effet, quelles que soient l’issue du scrutin, la composition de l’Assemblée Nationale et du gouvernement, le SNES-FSU maintiendra ses revendications, continuera à les porter, à instaurer un rapport de force et à lutter dans l’intérêt des professionnel les de l’Education. De fait, si le programme du Nouveau Front Populaire reprend de nombreux mandats de notre organisation, d’autres en sont absents : abrogation de la loi de transformation de la fonction publique, défense des fondements initiaux de la sécurité sociale, scolarité obligatoire portée à 18 ans, abrogation des réformes Blanquer du bac et du lycée, réforme de la formation initiale ou de la voie professionnelle notamment.
Les luttes continueront donc pour obtenir satisfaction, y compris par la grève, dès le début de la législature, quel que soit le résultat des élections.
Parce que battre l’extrême droite est une nécessité et une urgence pour la société tout entière et pour l’école, parce que l’espoir d’une victoire des forces politiques du progrès social est crédible, notre mobilisation doit être à la hauteur : le 30 juin et le 7 juillet dans les urnes et avant, par le débat, la diffusion d’information, mais aussi dans les rues, notamment le 23 juin. Le SNES-FSU, aux côtés de la FSU, se joint à de nombreuses organisations et associations pour sonner les alertes féministes sur les dangers représentés par l’extrême droite pour les droits et libertés des femmes.
Le SNES-FSU travaille également à préparer une rentrée offensive et à la hauteur des enjeux pour les personnels et pour l’Education.
Texte adopté par 27 voix pour ; 2 voix contre ; 4 abstentions